Benoît Piron est producteur et technicien en arboriculture fruitière biologique à la tête de l’EARL Les Vergers de pirouette à Saint-Pardoux. Il réagit aux propos tenus par certains de ses collègues arboriculteurs sur la récolte à venir et apportent quelques précisions.

Comment s’annonce la future production aux Vergers de Pirouette ?
Benoît Piron : « Concernant les pommes, il est vrai que l’année s’annonçait très pessimiste. À la sortie des fleurs, nous nous sommes aperçus à cause des aléas climatiques que bon nombre d’entre elles coulaient. Aujourd’hui mon regard est tout autre : certes nous avons de la perte mais soyons positifs et disons les choses telles qu’elles sont. Certaines variétés ont été touchées, notamment les clochards, juliet, braeburn, un peu golden ; mais beaucoup d’autres présentent à ce jour un bon potentiel comme gala, belchard, goldrush, crimson. Cela dit, je reconnais que certains producteurs sont plus touchés que d’autres mais en moyenne cette année, comptons plutôt 30 % de perte et non 60 % comme certains l’annoncent, ce n’est pas tout à fait la même chose ».

Et pourtant certains de vos collègues disent le contraire…
« Voilà maintenant 20 ans que je fais de l’arbo et je crois n’avoir jamais connu de bonne année. Pourtant nous produisons toujours des pommes, non ? Si la pomme ne marchait plus, nous aurions déjà arrêté de produire en Gâtine voir même en France ! »

On dit aussi qu’il y a eu une mauvaise pollinisation et que les abeilles ne sortaient pas…
« Effectivement, avec les intempéries et le froid, les insectes pollinisateurs comme les abeilles ont été retardés dans leur travail. Mais une nouvelle fois, soyons transparents sur nos méthodes de travail. Exerçant une petite activité apicole, je peux assurer que nos premières miellées sont équivalentes à celles de l’an dernier. On peut en conclure que nos abeilles ont bien travaillé ».

Pourquoi ne sont-elles pas allées sur vos pommiers ?
« Au risque d’en fâcher certains, mais pour être le plus sincère possible avec les consommateurs, il faut savoir qu’en année pluvieuse les risques de maladies et ravageurs sont très élevés. L’ensemble de nos interventions sanitaires ont été plus importantes, gênant ainsi l’appétence des fleurs pour les abeilles ».

Et en bio c’est différent ?
« Au contraire, comme les arboriculteurs bio n’ont pas le droit à certains produits de synthèse, ils ont dû multiplier leurs interventions, notamment les produits soufrés qui ont un effet répulsif sur les abeilles et bloque la germination des pollens dans le tube pollinique. De plus aujourd’hui dans le nouveau cahier des charges bio, de nouveaux produits comme les neurotoxiques sont autorisés sur nos cultures et sont très dangereux pour les abeilles et nos insectes pollinisateurs. Alors quand certains arbo bio sont surpris du mauvais fonctionnement de leurs abeilles, je préfère en rire, soyons logiques ! »

Le bio que vous nous décrivez n’est pas si bon que ça…
« En tant que producteurs bio, ça me fait terriblement mal de dire cela, mais la nouvelle réglementation bio sera à long terme plus dangereuse que celle du conventionnel. Nous n’avons aucuns reculs sur les nouveaux pesticides autorisés en bio. Chose certaine, contrairement aux produits chimiques du conventionnel qui ont des actions ciblées, ces pesticides utilisés en bio sont des « tues tout ». Quels que soient nos politiques, leur volonté est d’avoir 20 % de bio pour 2020 : objectifs du Grenelle de l’environnement. Ce bio a pour but d’alimenter restauration collective, GMS, divers magasins bio comme les Biocoop… Pour être certain de trouver du bio, il faudra probablement se tourner vers d’autres labels, comme biocohérence, demeter, etc., et trouver des producteurs locaux sincères avec une vraie éthique bio… »

Benoît PIRON